AGRICULTURE AU SÉNÉGAL : la modernisation et l’implication des jeunes plus qu’une nécessité

La modernisation de l’agriculture et la souveraineté alimentaire ont été au cœur du sommet Dakar 2 qui s’est tenu du 25 au 27 janvier, à Dakar. L’atteinte de tels objectifs, selon certains acteurs, est possible à travers l'appui à la recherche dans le secteur, mais surtout en faisant de l’agriculture un métier valorisant auprès des jeunes.

AGRICULTURE AU SÉNÉGAL : la modernisation et l’implication des jeunes plus qu’une nécessité

Nombre de spécialistes et acteurs dans le domaine l’ont dit et continuent  d’en insister : l’agriculture est un secteur  qui peut favoriser la  croissance économique des pays africains et participer également à la création d’emploi, (…) et pour en être convaincu, l’a rappelé le président de la Banque africaine de développement, Akinwumi Adesina, il faut traduire la volonté politique en actions décisives.

Il existe cependant plusieurs actions qui concourent à faire de l’agriculture un secteur clé du développement des pays africains. Pour Birame Faye, Coordonnateur régional médias à l’Institut panos Afrique de l’Ouest, la recherche est un axe fondamental. Appuyer les chercheurs à développer des spéculations adaptées à des saisons et  cycles différents est,  selon lui, un impératif pour la modernisation de l’agriculture au Sénégal et en Afrique de façon générale. « Nous faisons face à un changement climatique qui a entraîné une dégradation des sols  qui  ne sont plus aussi fertiles qu'auparavant. Donc, il faut des intrants durables qui ne dégradent pas l'environnement. Aussi des variétés culturales à cycles courts, surtout pour les cultures pluviales.  Par exemple : toutes les spéculations qui duraient 4 à 5 mois pour mûrir, maintenant, il en faut celles qui  durent sur 2 mois voire 45 jours. C’est plus sûr ! », propose-t-il.

 Jean-Paul Bampoky, Directeur régional du développement rural (Drdr) de Louga, pense  également que cette modernisation sera réussie lorsque l’Etat appuie les instituts de recherche, comme Isra. «Mais également soutenir les petits producteurs, en leur fournissant des semences et matériels agricoles tout en les accompagnants dans la  transformation », soutient M. Bampoky

 " Il faut en faire un métier valorisant "

La modernisation de l’agriculture, concrètement, c’est sa mécanisation. Elle a pour objectif l’atteinte de meilleures productions agricoles, la souveraineté, la sécurité et l’autosuffisance alimentaire. Selon nos interlocuteurs, la jeunesse a alors un rôle très important à jouer dans cette transformation de l’agriculture.

Birame Faye constate que les jeunes ont une mauvaise perception de l’agriculture. D’où, dit-il, il est important de valoriser ce métier auprès d’eux pour qu’ils se l’approprient. «Avec les études, les jeunes ruraux qui ont grandi dans des exploitations agricoles, familiales, qui connaissent les champs, ont tendance à quitter les champs. Alors ça devrait être le contraire.  Même des jeunes urbains devraient pouvoir retourner en milieu rural pour cultiver. Mais pour y arriver, il faut que l'État fasse de l'agriculture un métier valorisant afin que les jeunes puissent savoir qu’en étant agriculteurs, ils pourront, au moins bâtir un foyer, probablement avoir un véhicule, construire une maison », pense le coordonnateur de médias à l’Institut Panos Afrique de l’Ouest.

De son côté, le Drdr de Louga  soutient que le secteur est un réservoir d’emploi « permanent et sûr.»  « Il faut donc motiver les jeunes à aller vers la terre à travers la mécanisation de la production », ajoute-t-il.

Et  «insister sur la communication à travers laquelle, suggère M. Faye, il serait important de montrer  des  champions qui excellent dans le secteur de l’agriculture afin qu’ils puissent servir de modèles aux jeunes.»

" Ça doit d’abord être une passion "

Kalilou Tamba suit une formation en agriculture à l’Institut supérieur d’agriculture et entrepreneuriat (Isae) à la Faculté des Sciences de l’Ucad. Pour lui, au-delà de voir l’agriculture comme un business, il faut en avoir d’abord la passion. Il serait important, pense-t-il, aussi, de faire comprendre aux jeunes sénégalais que l’agriculture « est un des secteurs qui peut leur permet de réussir dans la vie et faire avancer leur pays.». « Il faut leur faire savoir qu’en s’activant dans l’agriculture, ils peuvent contribuer à la création d’emploi, mais aussi à l’autosuffisance alimentaire et à la diminution de l’importation de certains produits et ainsi jouer en faveur de la balance commerciale de leur pays», soutient l’étudiant de l’Isae. Il regrette cependant le fait qu’il y ait une rupture de stock de certains aliments sur le marché  au Sénégal, «malgré la disponibilité de terres arables et une population très jeune que le pays compte.»

Toutefois, Kalilou Tamba soulève les difficultés qui peuvent faire barrière à l’entrepreneuriat agricole des jeunes. « D’abord, pour entreprendre, il  faut connaître le secteur. A défaut de quoi, demander l’avis d’un spécialiste qui puisse nous orienter sur l’investissement à faire dans ce domaine de l’agriculture pour que l’on puisse avoir  une rentabilité conséquente. Il y a également l’accès au financement qui est aussi une grande difficulté. Beaucoup d’entre nous attendent que l’Etat les finance. Ce qui n’est pas évident. Et, à mon avis, concernant  l’accompagnement de l’Etat, les jeunes qui ont appris l’agriculture et qui ont un savoir-faire dans ce domaine doivent être priorisés, parce qu’ils réaliseront facilement des performances », pense Kalilou Tamba.

Par Ibrahima MINTHE